L’école française a été créée en 1942 par des parents d’élèves restés en Turquie pendant la guerre, suite à la fermeture officielle en 1940 du Séminaire Saint Louis (ou petit séminaire) des Pères capucins, qui remplissait jusqu’alors cette fonction.
Le couvent et le séminaire de Saint-Louis des Français étaient établis depuis 1628 dans l’enceinte du Palais de France, à Beyoğlu, mais les religieux en avaient été expulsés à la Révolution française. A leur retour en 1882, le (petit) séminaire interrituel Saint-Louis de Pera prodigua durant une soixantaine d’années un enseignement en français à un petit groupe d’externes composés d’enfants des familles françaises et levantines d’Istanbul, à côté du grand séminaire qui formait les prêtres latins -internes- pour le clergé des églises d’Orient de rites chaldéen, grec, syrien et arménien. L’Ecole française d’Istanbul, ou le Lycée « Papillon »…
Au départ, les cours étaient dispensés à une dizaine d’élèves par des professeurs bénévoles qui travaillaient au Lycée Galatasaray ou dans les lycées congréganistes, et par des pères capucins, dans les salles du séminaire capucin, mais aussi dans des salles du Consulat de France à Taksim, ou chez des particuliers. Cette dispersion des locaux lui aurait valu le surnom d’école « Papillon » que de nombreux anciens élèves utilisent encore. Selon une autre interprétation, Papillon est le nom d’un des fondateurs de l’école après la guerre. Ce surnom renvoie enfin au titre d’une chanson célèbre de 1936 (« Au Lycée Papillon », par Georgius) dans laquelle un professeur interroge les cancres de la classe. Le nom officiel de l’établissement à cette époque est cependant « Ecole française d’Istanbul ».
Une école en essor
Dès 1948, les salles du séminaire accueillent deux classes d’élèves de primaire. Dans les années 50, une maternelle est créée dans des annexes du Palais de France. Le secondaire est à cette époque assuré dans les locaux du Centre culturel, à Taksim. Le secrétaire général du centre occupe les fonctions de directeur d’école. L’enseignement est assuré par des enseignants détachés dans les autres établissements scolaires, les cours par correspondance palliant l’absence d’enseignement direct dans certaines disciplines. Le nombre moyen d’élèves est de dix par classe. En 1962 est créée une Association de gestion de l’Ecole française, réunissant parents français et professeurs. C’est à cette époque que l’école se dote d’un directeur élu parmi les enseignants. Toutefois, le nombre total d’élèves ne cesse d’augmenter : d’une cinquantaine en 1950, il passe à une centaine dans les années 60 ; puis à 300 en 1975. Ceci s’explique par la volonté d’ouvrir l’école aux enfants de nationalité turque, et entraîne pour la première fois la nomination d’un directeur par l’Etat français. Au début des années 80, l’arrivée importante de français en Turquie, entraîne le doublement des effectifs. En raison du manque de place au Centre culturel, le Collège s’installe progressivement dans les locaux du séminaire, avant d’être rejoint en 1989 par le Lycée. La barre des 800 élèves est dépassée dans les années 90. Le Lycée Pierre Loti – Beyoğlu
L’école française devient Lycée Pierre Loti cette même année, après un vote des élèves. Ce nom rend hommage à l’écrivain qui fit sept séjours à Istanbul de 1876 à 1913, écrivit des romans inspirés par ces séjours (« Aziyadé », « Les désenchantées », « Fantôme d’Orient » etc.) et contribua à faire connaître Istanbul et l’Empire ottoman en France. En 1989 toujours, une convention signée entre l’Etat français et les Capucins met une partie du séminaire à la disposition de l’établissement. Ces salles reçoivent le secondaire et trois classes de primaire, les autres étant accueillies dans des locaux situés du côté du Palais de France. Enfin, en l’an 2000, en échange de ces salles de classe proches de l’église, les Capucins cèdent l’utilisation de l’ensemble des locaux restants au Lycée.
L’école primaire occupe toujours ces locaux profondément remaniés en 1989. De plus, en 1992, le Tribunal (construit en 1844) a été attribué à l’école après réhabilitation. Dans ce dernier bâtiment, où sont installées les classes de maternelle, les ressortissants français étaient jugés indépendamment de la juridiction ottomane en vertu du statut des « capitulations » qui avait été accordé en 1534 par traité entre François 1er et Soliman le magnifique, et qui fut dénoncé à la fondation de la République en 1923. Le Palais de France, de style Louis-Philippe, date des années 1840 (1839-47) et a été en partie réaménagé entre 1908 et 1913. L’église Saint-Louis fut construite en 1846 ; l’ancien bâtiment des « drogmans » (interprètes de l’Ambassade), désormais occupé par l’Institut français d’études anatoliennes, en 1874. Les bâtiments du couvent et du séminaire des Capucins ont été eux construit en 1889. Une partie de ces derniers locaux a fait l’objet de travaux lourds de mise en conformité sismique et incendie en 2001-02. Une seconde tranche de travaux devrait être réalisée dans un avenir proche.